Il sera désormais possible aux villes allemandes d’interdire la circulation des vieilles voitures diesel trop polluantes, lorsque des seuils de pollution seront atteints. Ainsi en a décidé la justice fédérale, une décision qui inquiète dans le pays des millions d’automobilistes, et notamment des artisans qui utilisent ces véhicules et que les pouvoirs publics s’emploient à rassurer.
Une application progressive de la mesure
La Cour administrative fédérale, installée à Leipzig, a ainsi confirmé des décisions de justice précédentes contraignant les autorités régionales qui le refusaient à interdire dans certaines villes – à commencer par Stuttgart et Düsseldorf – les véhicules diesel les plus anciens, afin d’y limiter la pollution. Elle précise que cela doit se faire progressivement, en commençant par les véhicules les plus anciens, et prévoit des exceptions, en particulier pour les artisans mais aussi pour “certains groupes d’habitants.”
Cette décision balaie cependant l’argument de certains Länder, qui affirmaient ne pas pouvoir agir sans loi nationale et ouvre la voie à d’autres villes tout aussi polluées pour appliquer les mêmes mesures.
Les véhicules roulant au gasoil sont estimés majoritairement responsables de la pollution aux particules fines et aux oxydes d’azote (NOx) à l’origine de bien des affections respiratoires et cardiovasculaires. Quelque 70 villes allemandes présentaient encore en 2017 des taux de dioxyde d’azote supérieurs au seuil annuel moyen de 40 microgrammes par mètre cube édicté par l’Union européenne, d’après l’Office fédéral de l’environnement. Munich, Stuttgart et Cologne sont les villes les plus touchées.
Un grand jour pour l’air pur
Il s’agit là d’une victoire des associations écologistes, en particulier la Deutsche Umwelthilfe, qui est à l’origine de cette procédure. Son chef, Jürgen Resch, déjà à l’origine de l’imposition des filtres à particules au début des années 2000, se défend d’être “un ennemi des moteurs diesel” mais se déclare “un ami de l’air pur.”
Il s’est donc naturellement réjoui de cette décision : “C’est un grand jour pour l’air pur” a déclaré cet écologiste, dont l’association avait mené en Allemagne une campagne anti-diesel en 2015, quelques jours avant que n’éclate le scandale des moteurs diesel truqués.
Les associations sont d’ailleurs rejointes par les communes. “Avec la décision d’aujourd’hui, la pression sur l’industrie automobile s’accroît pour qu’elle rende les véhicules diesels plus propres“, a estimé Markus Lewe, président de la Fédération des communes allemandes (Städtetag). “Les villes ne veulent pas d’interdictions de circulation” a-t-il rappelé en exhortant les constructeurs automobiles à faire davantage. “Nous appelons instamment l’État Fédéral à abandonner ses réserves à l’égard de l’industrie automobile et à instaurer rapidement” une “vignette bleue” pour les véhicules les plus propres.”
Des mesures restreintes selon les pouvoirs publics
Les pouvoirs publics fédéraux, sous la double influence de l’impopularité de cette mesure auprès de nombreux électeurs et du lobby automobile allemand, se sont attachés à minimiser la portée de l’arrêt, expliquant que cela ne visait ni “tout le territoire” ni “tous les automobilistes” et estimant que ces interdictions restaient “évitables.”
Quant aux constructeurs automobiles, ils font par ailleurs valoir que seul le diesel permet d’atteindre les objectifs climatiques de Berlin, puisqu’il rejette moins de gaz à effet de serre que les moteurs à essence, même s’il émet plus d’oxydes d’azote nocifs pour la santé.
Mais les propriétaires de véhicules ne répondant pas à la norme Euro 6 ne peuvent plus être certains de circuler librement dans les villes à tout moment de l’année. Cela viserait plus de 10 millions de voitures, estimées potentiellement concernées.
Source : AFP le 28/02 et le 26/02