Alors que l’Europe a fixé un seuil de 10 % d’énergies renouvelables pour le secteur des transports afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre, le Commissariat Général au Développement Durable (CGDD) revient dans une étude intitulée Bilan Carbone : vers une prise en compte des changements indirects d’affectation des sols, sur les bilans carbone des biocarburants. En effet les analyses en cycle de vie classiques, comme celle de l’ADEME en 2009, ne prennent pas en compte les conséquences du développement des biocarburants sur les changements d’affectation des sols (CAS), qui peuvent être à l’origine d’importantes émissions de CO2.
L’étude du CGDD reprend donc ce bilan carbone et expliquent les impacts potentiels du changement d’affectation des sols liés au développement des cultures énergétiques. On différencie généralement deux types de changements d’affection des sols (CAS) : les CAS directs, lorsque les cultures non-alimentaires sont directement cultivées sur des terres qui auparavant stockaient du carbone (pâturages, forêts) et les CAS indirects, lorsque les cultures originellement destinées à des fins alimentaires remplacent les cultures alimentaires dans les assolements. Ces derniers impliquent soit une moindre production alimentaire, soit la conversion de nouvelles terres pour satisfaire la demande alimentaire, éventuellement dans un pays tiers.
Des études confirment déjà l’importance des CAS indirects et convergent d’ailleurs avec celles menées par la Commission Européenne. En octobre 2012, cette dernière a donc proposé de limiter la contribution des biocarburants de première génération (issus de plantes directement produites dans ce but) dans l’atteinte de ses objectifs et de développer les biocarburants de deuxième génération, produits à partir de matières premières non alimentaires (déchets, paille) dont « les émissions totales sont sensiblement inférieures à celles des combustibles fossiles et qui n’interfèrent pas directement avec la production alimentaire mondiale. »
La Commission Européenne a envisagé quatre options pour lutter contre les impacts des CAS indirects, dont l’étude du CGDD analyse les avantages et les inconvénients : ne prendre aucune mesure et surveiller simplement la situation ; relever l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre (mais cela n’appréhende pas l’impact indirect sur l’affectation des sols en tant que telle par la filière des biocarburants) ; introduire de nouvelles exigences en matière de durabilité applicables à certaines catégories de biocarburants ; introduire un facteur spécifique de prise en compte des émissions de CO2, correspondant aux émissions du CAS indirect.
Le Commissariat Général au Développement Durable estime que « compte-tenu de la multiplication des travaux scientifiques confirmant l’importance des changements d’affectation de sols indirects et leur rôle négatif sur le bilan carbone des biocarburants » leur prise en compte est dorénavant indispensable. Il faut donc développer d’autres biocarburants, dits de seconde génération, et sans doute utiliser d’autres techniques :
A cet égard, il est important de noter que les CAS indirects et les émissions induites ne sont pas une fatalité. Outre l’usage de matières premières non alimentaires, ils peuvent être réduits par diverses mesures techniques ou organisationnelles que peuvent développer les filières, comme, toutes choses égales par ailleurs, l’amélioration des rendements, la meilleure valorisation des coproduits par exemple dans l’alimentation animale et, globalement, une meilleure synergie agronomique avec d’autres productions.
Source : CGDD