Dans la perspective de la généralisation du chèque-énergie en 2018, le Ministère de le Transition Ecologique et Solidaire a publié un rapport d’évaluation des deux ans d’expérimentation dans quatre départements. Bilan plutôt encourageant selon le ministère, mais jugé « lacunaire et imprécis » par l’UNCCAS (Union Nationale des Centres Communaux d’Action Sociale), qui avait publié en août dernier sa propre évaluation du dispositif.
Le bilan gouvernemental
Dans l’Ardèche, l’Aveyron, les Côtes d’Armor et le Pas-de-Calais, 170 000 chèques ont été distribués en 2 ans, soit 3 % de bénéficiaires de plus que les tarifs sociaux (qui ne concernent que le gaz et l’électricité). Selon le bilan gouvernemental, les bénéficiaires ont bien compris le dispositif qui permet, sous condition de ressources, de payer les factures de tout type d’énergie, ou des travaux de rénovation énergétique.
Le critère d’éligibilité est jugé simple et globalement le rapport montre « des résultats encourageants qui peuvent encore être améliorés » notamment en ce qui concerne le taux d’utilisation et le non recours. 9 chèques sur 10 servent à payer l’électricité ou le gaz, le reste est presque intégralement consacré à d’autres sources d’énergie comme le fioul ou le bois. Très peu ont été utilisés pour payer des travaux de rénovation énergétique, ce que le rapport explique par une communication axée sur le paiement des factures d’énergie. De toute façon, son montant, même cumulable sur 3 ans, ne contribuerait que très peu à payer de tels travaux.
En conclusion, le rapport préconise de renforcer l’information des bénéficiaires et de mieux associer les relais sociaux, de simplifier l’usage du chèque, d’améliorer l’accès aux droits associés, de mieux informer les bénéficiaires sur le dispositif d’aide à la rénovation thermique, de revaloriser en moyenne de 50 € en 2019 le montant (pour une moyenne de 200 € par ménage et par an) et d’envoyer les chèques sur une période resserrée.
Le jugement sévère de l’UNCCAS
Au vu de ce bilan, l’UNCCAS en regrette, dans un communiqué, « le caractère lacunaire et imprécis » et une impossibilité en l’état d’une généralisation dans de bonnes conditions. Elle constate que :
- « Le taux de recours au chèque énergie, bien qu’en augmentation en 2017, reste très insatisfaisant. En effet, plus d’un bénéficiaire potentiel sur cinq n’a pas effectué les démarches pour en bénéficier. Il y a donc lieu de craindre que le dispositif soit un facteur de précarisation.
- Le ciblage de cette aide par le seul critère du revenu fiscal contribue à l’exclusion du dispositif d’une partie des personnes souffrant de précarité énergétique notamment celles n’ayant pas réalisé de déclaration d’imposition ou ayant vu leur situation changer au cours des deux dernières années.
- Le nombre d’attestations de droits connexes reçues par les fournisseurs d’énergie est dérisoire : les protections associées à cette aide ne sont donc aujourd’hui plus garanties, ce qui constitue un recul par rapport aux tarifs sociaux. »
Le bilan des CCAS
En effet, dans leur bilan révélé en août dernier, les CCAS mettent l’accent sur une communication vers le grand public insuffisante, qui a certainement eu un impact sur le non recours (beaucoup de chèques jetés ou égarés, les bénéficiaires n’en comprenant pas l’usage). Les structures accompagnantes elles mêmes n’ont pas toujours et pas suffisamment été informées (notamment avant la mise en place de l’expérimentation, ce qui les a empêchées de prévenir le public).
Côté public, le courrier d’information reçu avec le chèque énergie est jugé insuffisant pour la compréhension du dispositif par tous : beaucoup de CCAS se font l’écho des difficultés de compréhension de certains bénéficiaires des modalités d’utilisation. Ils préconisent de retravailler le format et la lettre d’accompagnement pour la clarifier. Ils jugent cette aide « visible et utile » en matière d’économies et ne remettent pas en cause son utilité. Mais ils estiment le montant du chèque loin d’être à la hauteur des besoins et son format non sécable ne permet pas un étalement sur l’année (diminution des mensualités par exemple). De plus des problèmes liés à l’encaissement des chèques ont été relevés (délais, refus pour le paiement d’impayés, etc.) et le fait qu’ils ne soient pas utilisables en paiement des charges locatives est déploré.
Ils préconisent en conclusion d’augmenter le montant du chèque de manière significative, de communiquer largement auprès du public, d’informer et outiller les organismes pouvant être concernés par cette réforme, de revoir le ciblage des bénéficiaires pour réduire le taux de non recours, de réfléchir à une automaticité de l’accès à cette aide et aux droits qui y sont associés.
Sources : Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire, UNCCAS