Pour faire consommer, c’est bien connu, il suffit de créer les besoins. C’est exactement ce que fait Evian pour dynamiser ses ventes d’eau minérale en bouteille. Bouteille ? pas tout à fait, plutôt Goutte d’eau, le tout nouveau concept que la marque veut lancer en innovant aussi côté distribution, mais qui au total, reviendra fort cher au consommateur.
L’eau n’a pas changé, bien sûr, mais un emballage en PET, en forme de goutte d’eau (et presque de la même contenance), qui contient 20 % de plastique d’origine végétale, scellé par un opercule lui aussi en PET transparent, sans étiquette, voilà pour les innovations au niveau contenant, innovations qui ont tout de même nécessité 3 ans de R&D, à la marque. Baptisée la « Goutte d’Evian », cette mini-bouteille contient tout juste 20 cl d’eau (l’équivalent d’un verre d’eau, juste de quoi étancher une petite soif). C’est de cette manière que Danone, maison-mère d’Evian, compte toucher un million de consommateurs dès cette année. Ainsi, explique Véronique Penchienati, directrice générale de Danone Eaux France, « nous voulons développer des occasions de consommation qui n’existent pas aujourd’hui et aller dans des endroits où il n’y a pas d’offre. »
Et pour cela Danone innove aussi au niveau distribution, en décidant de se passer des circuits grande distribution, car « on a envie de vendre ce produit avec un vrai service c’est-à-dire d’apporter une solution d’hydratation aux consommateurs à des moments où ils n’ont pas justement ces solutions » poursuit la responsable. Pour cela, le groupe va mettre en place un réseau de vendeurs ambulants : 35 sillonneront Paris à partir du mois de mai et pour tout l’été, à bord de triporteurs et les « Gouttes » seront aussi proposées aux stations de Velib (grâce à un partenariat avec Decaux) et près des kiosques à journaux les plus fréquentés. Pour la suite, il mise sur les lieux de vie de prestige (hôtels comme la chaîne Hilton) ou de passage et des partenariats sont à l’étude avec les boutiques de chocolat (Lindt), les salons de coiffure (Dessange a déjà signé) et des marques de café (Segafredo).
La marque prévoit bien entendu le lancement d’un circuit de recyclage pour ces bouteilles qui s’écrasent d’une main une fois vidées. Mais si elles sont plutôt destinées à des lieux de passage, la collecte ne sera pas aisée et elles risquent donc d’atterrir dans les poubelles des rues, sans autre mesure de tri. D’autre part, ces bouteilles se vendront 1 € l’unité, soit 5 € le litre, ce qui rapproche le prix de l’eau de celui du vin, le met 40 % plus cher que la bouteille de 50 cl vendues par les distributeurs et dix fois plus cher que celui des bouteilles achetées en grande distribution. Ou encore, elle revient à une fois et demie le prix moyen du mètre cube d’eau du robinet ! Mais, assure Véronique Penchienati, « l’eau du robinet et l’eau minérale sont deux produits totalement différents qui ne se concurrencent pas, les consommateurs choisissent l’eau minérale pour son goût et ses qualités propres. »
Mieux encore, note Challenges, « ce mode de distribution ressemble beaucoup à une campagne d’échantillonnage, à ceci près que les consommateurs paieront leurs échantillons. » Ce que souligne aussi Jean-Daniel Pick, associé au sein du cabinet OC&C : « Même si Danone ne gagnait pas d’argent avec ce produit, cela reviendrait à de l’échantillonnage gratuit pour la marque et ce serait une bonne façon de remettre son eau en bouche à un moment d’impulsion. »
Sources : Process Alimentaire, BFMTV, Challenges, Le Figaro