La Commission de Régulation de l’Energie (CRE) mène depuis 4 ans une réflexion sur le développement des réseaux électriques intelligents (ou « smart grids »), afin de s’assurer de leur bon fonctionnement et de leur développement au bénéfice des consommateurs. Pour cela, elle a associé les différents acteurs des réseaux intelligents en France à sa démarche. Elle vient de publier la synthèse de ces travaux. Ceux-ci ont permis de recueillir, d’évaluer et d’analyser les questions liées à l’évolution des réseaux électriques sur six thèmes :
- l’insertion de la recharge des véhicules électriques aux réseaux électriques ;
- l’intégration des énergies renouvelables aux réseaux électriques en basse tension
- les services que pourraient apporter le stockage d’électricité et les modèles d’affaires associés ;
- la gestion active de la demande ;
- les spécificités des zones insulaires ;
- les problématiques communes aux différents thèmes abordés.
L’insertion des bornes de recharge des véhicules électriques au réseau électrique.
Selon les acteurs, le cadre actuel concernant les infrastructures de recharge doit évoluer et la question de la qualification juridique de l’activité de recharge reste ouverte : « contrat de fourniture de service » ou « contrat de fourniture d’électricité » ?
Différentes solutions sont envisagées pour piloter la recharge des véhicules électriques : par exemple l’importance du pilotage du moment de la recharge et du niveau de puissance appelée ; le besoin d’interopérabilité et de dispositifs communicants ; la tarification et le prix de l’électricité qui peuvent apporter des solutions pour piloter la recharge des véhicules électriques ; des évolutions des modalités de raccordement qui sont évoquées ; le rôle clé dans l’insertion des bornes de recharge au réseau des acteurs en aval du compteur et la de gouvernance du pilotage des recharges
Les modalités de déploiement des bornes de recharge sont une problématique à traiter : ainsi le rôle des acteurs concernant le déploiement des bornes de recharge accessibles au public pourrait être précisé et des adaptations du cadre actuel sont à envisager pour faciliter le déploiement des bornes de recharge dans les immeubles collectifs.
L’intégration des énergies renouvelables au réseau électrique en basse tension
Les principes régissant le plan de tension et la réalisation des études de raccordement pourraient évoluer avec l’arrivée des technologies Smart grids. De plus, l’utilisation des capacités constructives des installations de production en basse tension permettrait de limiter les coûts d’intégration des énergies renouvelables (EnR). Mais les modalités financières de participation des producteurs d’EnR aux coûts de réseaux divisent les acteurs. Certains proposent une implication des producteurs d’EnR dans la gestion de l’équilibre du réseau et l’équilibre local de la production d’EnR et de la consommation pourrait être encouragé. Par ailleurs, le développement des technologies de l’information et de la communication sur les réseaux et au niveau des installations de production permettrait d’optimiser la gestion du réseau. Cependant, le rôle des gestionnaires de réseaux de distribution devrait évoluer et la diversité des sources d’EnR devrait être prise en compte.
Les services que pourrait apporter le stockage d’électricité et les modèles d’affaires associés
Des solutions sont proposées par les acteurs pour permettre au stockage de faciliter l’intégration des EnR au réseau et de moduler davantage la consommation.
La valorisation des services apportés par le stockage aux gestionnaires de réseaux pourrait être facilitée par certaines évolutions : une valorisation des services apportés au gestionnaire du réseau de transport qui pourrait s’intégrer dans les dispositifs existants et la création de dispositifs est demandée pour valoriser les services apportés aux gestionnaires de réseaux de distribution.
Des questions sont soulevées sur le cadre dans lequel s’inscrit le développement des technologies de stockage : ainsi la question de la tarification du stockage fait débat, les acteurs sont favorables à des aides financières sous condition et la gouvernance du stockage pourrait être précisée (certains acteurs estiment que les besoins de stockage pourraient être définis ex ante et proposent différentes pistes concernant l’activation et l’exploitation des dispositifs de stockage). La prise en compte des spécificités locales est considérée de manière transverse par certains.
La gestion active de la demande
Une plus grande modulation de la consommation pourrait être permise par des évolutions du cadre actuel : les acteurs déplorent les faiblesses du cadre actuel pour valoriser la « stimulation de la consommation » sur les marchés et demandent des signaux prix pour moduler davantage la consommation.
Une concurrence loyale doit pouvoir s’établir entre les acteurs mais la gestion de la demande ne se fera pas sans la sensibilisation des consommateurs aux technologies ad hoc. Il serait d’autre part nécessaire d’aller vers un rôle d’encadrement de la flexibilité pour les gestionnaires de réseaux de distribution.
Les spécificités des zones non interconnectées (ZNI)
Des évolutions du cadre spécifique aux ZNI en matière d’intégration des EnR sont proposées. Par ailleurs, un cadre spécifique pour le stockage est actuellement en cours de développement. Une implication des collectivités territoriales particulièrement forte est soulignée dans les ZNI. Les thèmes de la qualité de l’électricité, des effacements et des études économiques des projets Smart grids dans les ZNI sont également évoqués par les acteurs.
Les problématiques communes aux différents thèmes abordés
L’articulation entre la gestion à une maille locale et la gestion globale du système électrique devient clé : la péréquation tarifaire fait consensus mais certains acteurs souhaiteraient la faire évoluer dans sa forme, d’autres s’interrogent sur le rôle des collectivités territoriales en matière d’énergie à l’échelon local. L’articulation entre la maille nationale et la maille locale devrait être améliorée et le gestionnaire de réseaux de distribution devrait pouvoir agir dans la gestion de l’équilibre à la maille locale en liaison avec le gestionnaire du réseau de transport. Des acteurs s’interrogent sur l’échelon à privilégier pour la gestion de l’énergie
De plus, de nouvelles données sont disponibles sur les réseaux qu’il convient de collecter, d’analyser et de transmettre aux acteurs habilités
Concernant l’interopérabilité et la pérennité des technologies Smart grids, l’importance des travaux de normalisation est soulignée par les acteurs et des actions restent à mener pour couvrir le risque de perturbation des signaux CPL.
En matière d’incitation à l’innovation, le droit à l’expérimentation pourrait être ouvert, ce qui demande une implication d’un plus grand nombre d’acteurs dans les démonstrateurs et une plus grande visibilité sur les travaux de recherche et développement.
Source : CRE