Les DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques) constituent un volume de plus en plus important à traiter, en Europe comme dans tous les pays développés. Pour connaître la quantité de déchets qui passent bien par le circuit officiel et les « fuites » éventuelles, l’ONG BAN (Basel Action Network) a mené une étude sur 314 équipements électroniques et extrapolé les résultats sur la quantité d’appareils mis au rebut chaque année. Les résultats montrent que si l’Europe fait dans le domaine bien mieux que les Etats-Unis, elle n’est cependant pas encore exemplaire. Et ce sont les pays en voie de développement qui en subissent les conséquences.
Des DEEE tracés dans 10 pays
Les 314 équipements électroniques (ordinateurs, écrans et imprimantes…) équipés de traceurs GPS étaient tous inutilisables et économiquement irréparables. Ils ont été répartis dans les 10 pays suivants : l’Autriche (18), la Belgique (29), le Danemark (20), l’Allemagne (54), la Hongrie (17), l’Irlande. (24), l’Italie (48), la Pologne (20), l’Espagne (45) et le Royaume-Uni (39). Tous ont été déposés en déchetterie. Ils contiennent en effet des substances ou composants dangereux pour l’environnement et la santé et doivent être recyclés.
Sur la totalité des DEEE suivis, l’étude montre que 19 (6 %) sont sortis des pays où ils avaient été déployés. Seule la Hongrie a réussi un sans-faute : aucun des équipements n’a échappé au circuit local de recyclage. Le Royaume-Uni fait mine de moins bon élève avec 5 appareils exportés.
Une exportation de 6 % des déchets
Le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, l’Irlande, la Pologne et l’Espagne ont tous autorisé l’exportation, vraisemblablement illégalement au regard de la règlementation européenne, de tels déchets électroniques vers les pays en voie de développement. Car plus de la moitié (11 sur 19, soit 61 %) y ont atterri.
Ainsi les 5 DEEE partis du Royaume-Uni sont arrivés au Nigeria (3), en Tanzanie (1) et au Pakistan (1). Pour les autres, l’ONG a pu les tracer jusqu’au Ghana, en Ukraine, au Pakistan, en Thaïlande et à Hong Kong. C’est le Nigéria qui en a reçu le plus grand nombre : 5 au total.
Les 19 unités exportées ont parcouru une distance totale de 78 408 km avec une distance moyenne parcourue individuelle de 4 127 km. Il semble évident, selon l’ONG que les coûts d’expédition ne dissuadent pas les exportations sur de longues distances.
Des chiffres extrapolés impressionnants…
Mais 6 % de DEEE échappés du circuit officiel, cela peut sembler ne pas constituer une préoccupation sérieuse. On peut gagner en perspective en extrapolant les taux d’exportation nationaux. L’ONG utilise pour cela les poids de déchets électroniques que ces pays produisent chaque année. Et là, les chiffres deviennent impressionnants.
En faisant ce calcul, on découvre en effet que les 19 unités qui s’échappent pourraient représenter jusqu’à 421 603 tonnes de DEEE exportés chaque année. Ceci permettrait de remplir environ 19 165 conteneurs intermodaux de 40 pieds (format standard). Dont 16 821 seraient acheminés vers les pays en développement et tout d’abord en Afrique. Chargés sur des camions de 18 roues mis bout à bout, cela représenterait une file qui s’étirerait sur 387 kilomètres !
…mais qui ne prennent en compte que l’Europe
Même s’il reste du pain sur la planche pour réduire ces quantités ici, la comparaison avec les Etats-Unis ferait presque apparaître l’Europe comme « exemplaire ». En effet, outre-Atlantique, cette exportation n’est pas interdite. Et le taux d’exportation de DEEE s’y élève à environ 40 %.
Or, en raison de l’absence de gestion appropriée de ces déchets dans les pays en développement « bénéficiaires » de ces exportations, dont la combustion à l’air libre de morceaux résiduels, il est certain qu’il y a contamination locale, exposition humaine et contamination des cultures. Les polluants incluent des métaux lourds hautement toxiques tels que le plomb, le cadmium et le mercure, entre autres.
Source : BAN