L’Europe va se doter d’un nouveau cadre réglementaire, le Digital Markets Act (Règlement des Marchés Numériques), pour encadrer les géants du web. Il vise à rendre le secteur numérique plus équitable et plus compétitif. Il veut interdire certaines pratiques afin que les grandes plateformes en ligne, qui se trouvent en position de « contrôleurs d’accès » vis‑à‑vis d’un grand nombre d’utilisateurs, n’abusent plus de cette situation.

Interdire des pratiques abusives
Ces dix dernières années, l’Europe a dû prononcer des amendes records contre certaines pratiques commerciales abusives de grandes plateformes en ligne. Elle change désormais de politique, en se dotant du Digital Markets Act, qui permettra de les interdire en amont. Celui-ci devrait entrer en vigueur dès janvier 2023 et s’accompagnera de certains bouleversements dans nos usages quotidiens.
« Le DMA permettra d’interdire directement ces pratiques et créera un espace économique plus équitable et contestable pour les nouveaux acteurs et les entreprises européennes. Ces règles sont décisives pour stimuler et déverrouiller les marchés numériques, renforcer la liberté de choix des consommateurs, permettre un meilleur partage de la valeur dans l’économie numérique et stimuler l’innovation », commente Cédric O, secrétaire d’État chargé du numérique.
Les Gafam directement visés
Le texte se veut donc outil de lutte contre les positions dominantes des géants du web : Amazon, Apple, Facebook, Google et Microsoft (les « Gafam », nommés dans le DMA « contrôleurs d’accès ») sont ainsi directement visés. Jusqu’à présent, impossible d’échapper par exemple à Google si on veut créer un site web ou à Apple pour une application sur i-Phone. Les grandes plateformes en ligne sont actuellement incontournables pour les entreprises souhaitant accéder aux utilisateurs.
Pour qu’une plateforme en ligne soit qualifiée de « contrôleur d’accès », elle doit « d’une part, dans les trois dernières années, soit réaliser un chiffre d’affaires annuel d’au moins 7,5 milliards d’euros au sein de l’Union européenne (UE), soit avoir une valorisation boursière d’au moins 75 milliards d’euros, et qu’elle devait compter au moins 45 millions d’utilisateurs finaux mensuels et au moins 10 000 utilisateurs professionnels établis dans l’UE », définit le texte. D’autre part, « la plateforme doit contrôler un ou plusieurs services de plateforme de base dans au moins trois États membres » (places de marché, boutiques d’applications, moteurs de recherche, réseaux sociaux, services en nuage, services de publicité, assistants vocaux, navigateurs web).
Le Digital Markets Act : des obligations pour les contrôleurs d’accès
Le Digital Markets Act vise donc des services que nous utilisons au quotidien. Il liste les obligations des Gafam, ainsi que les interdictions. Ils devront notamment assurer le droit de se désabonner de leurs services, de ne plus se voir imposer des logiciels par défaut (navigateur web par exemple) à l’installation du système d’exploitation, etc. Ils devront également assurer l’interopérabilité des fonctionnalités de base leurs services de messagerie instantanée et informer la Commission européenne des acquisitions et fusions qu’ils réalisent.
Ils ne pourront plus classer leurs propres produits ou services de manière plus favorable que d’autres, réutiliser les données personnelles collectées dans une prestation pour une autre, ou encore établir des conditions déloyales pour les utilisateurs professionnels, préinstaller certaines applications logicielles, etc.
En ce qui concerne ce Digital Markets Act, l’Europe a la main lourde en cas d’infraction. Les sanctions prévues peuvent atteindre 10 % de son chiffre d’affaires mondial total, et en cas de récidive 20 % de son chiffre d’affaire mondial.
Source : Conseil de l’Europe