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Eau : précipitations importantes et sécheresse peuvent être compatibles

Infiltration de l'eau de puie
Infiltration de l'eau de puie

En ces temps où l’actualité nous parle aussi fréquemment de sécheresse que d’inondation, selon les régions, on a parfois du mal à comprendre comment circule l’eau sous nos pieds. Un article de Violaine Bault, ingénieure hydrogéologue BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières), paru dans The Conversation fin mai (En France, les pluies de mai permettront-elles de mieux affronter la sécheresse estivale ?), nous explique tout sur l’infiltration de l’eau dans les nappes en fonction des saisons et de la géologie. Une eau souterraine qui, rappelle-t-elle, assure 65 % de notre alimentation en eau potable.

L’eau des pluies de mai profitent aux plantes

Ainsi, le mois de mai a cette année été particulièrement frais et humide en France. Cela signifie-t-il pour autant qu’il a permis de recharger les nappes phréatiques et nous promet un été à l’abri de la sécheresse ? Eh bien, non, puisque fin mai, les niveaux des nappes restaient en effet majoritairement en baisse par rapport à avril. Toute cette eau tombée n’aura profité qu’à la végétation, très en demande à cette période, en humidifiant les sols.

Cela permet juste d’alléger les prélèvements agricoles. « D’après la Banque nationale des prélèvements quantitatifs en eau, l’irrigation représente 15 à 23 % des volumes pompés dans les nappes, soit entre 0,8 et 1,3 milliard de mètres cubes par an pour la période 2012-2018 ; le reste des prélèvements concerne l’eau potable (61 à 67 %) et les usages industriels (16 à 18 %) », explique l’auteure de l’article.

Nappes réactives ou inertielles

Mais l’infiltration de l’eau dans les sols dépend avant tout de la géologie. Ainsi certaines nappes sont « réactives » : les écoulements souterrains y sont rapides (alluvions du Rhône, calcaires karstifiés du Jura et de Provence). Mais les niveaux se stabilisent ou baissent aussi rapidement lorsque la pluie s’arrête.

Sur les nappes « inertielles », où les eaux souterraines s’écoulent lentement, il faut attendre des jours, voire des semaines, pour savoir si l’eau s’infiltre en profondeur. « En sachant que plus la nappe est inertielle et profonde, plus l’impact sera faible. Il sera même probablement inexistant sur les nappes très inertielles de la craie et des formations tertiaires du Bassin parisien. »

Environ 1/5ème des précipitations s’infiltrent

En France, 20 à 23 % des précipitations annuelles moyennes seulement parviennent à s’infiltrer en profondeur. Et la recharge des nappes a principalement lieu pendant l’automne et l’hiver. Au printemps et en été, les eaux de pluies sont piégées avant de s’infiltrer, en raison de l’ensoleillement et de la température.

Après la pluie, une part de l’eau ruisselle vers les cours d’eau. L’écoulement est déterminé par la pente du terrain, par la perméabilité et par la saturation en eau des couches superficielles du sol. « Les eaux s’infiltrent si elles ont la possibilité de stagner et s’il existe des espaces connectés et libres ». C’est le cas particulièrement des sols limoneux du nord de la France et des sols développés sur les roches calcaires.

A l’inverse, elles ruissellent plus sur les secteurs constitués des marnes, tourbes ou argiles peu perméables, sur les terrains en forte pente, les sols saturés en eau situés en vallées et en zones humides. « Plusieurs éléments, comme l’intensité et la quantité des pluies, la couverture végétale, l’activité biologique et les aménagements liés aux activités humaines, peuvent agir sur la capacité du sol à absorber l’eau. »

De nouveaux obstacles pour l’eau après la couche superficielle

Mais l’eau qui a franchi la couche superficielle rencontre de nouveaux obstacles. Les argiles et les sols riches en matière organique, ainsi que les sols faiblement poreux, les retiennent. Ce sont les plantes qui en profitent. Elle est ensuite évaporée par transpiration vers l’atmosphère. Seul l’excédent peut se diriger vers les profondeurs (inexistante au printemps et en été, sauf événement exceptionnel).

Encore ne circule-t-elle pas verticalement pour atteindre la nappe. Son chemin va dépendre « de la porosité efficace de la roche traversée, c’est-à-dire à l’existence de vides interconnectés ». Sa vitesse sera ainsi très lente au sein de pores peu connectés, mais rapide si l’eau circule à travers des fissures, des fractures ou des karts. De l’ordre d’un mètre par mois, un mètre par jour ou encore plusieurs dizaines de mètres par jour pour les systèmes très fissurés.

Pour arriver jusqu’aux nappes, le temps dépend de plus de l’épaisseur de la zone à traverser. L’eau pourra mettre de quelques heures à quelques mois pour atteindre la nappe (jusqu’à 2 à 3 mois pour les nappes de la craie et les nappes de formations tertiaires). Et celle-ci sera plus ou moins sensible à des sécheresses prolongées. « L’estimation de la part des pluies infiltrée en profondeur demeure complexe et difficilement quantifiable », conclut l’auteure.

Source : The Conversation

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