L’État va devoir revoir sa copie sur les nouvelles règles d’épandage des pesticides en agriculture. Ainsi en a décidé le Conseil d’État par décision du 26 juillet. Ces règles étaient contestées à la fois par des communes, associations et agriculteurs bio qui les jugeaient insuffisantes et par une chambre d’agriculture et des agriculteurs qui, eux, les considéraient excessives. L’État a 6 mois pour augmenter les distances minimales et mieux protéger travailleurs et riverains.

Un arrêté sur l’épandage des pesticides déjà revu
Le conseil d’État avait déjà annulé plusieurs dispositions de l’arrêté ministériel du 4 mai 2017 « relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants » (plus couramment dénommés pesticides). Il jugeait que ces dispositions ne protégeaient pas suffisamment la santé publique et l’environnement.
Il a ordonné en juin 2019 que les règles d’utilisation et d’épandage de pesticides en agriculture soient complétées pour être plus protectrices des populations. De nouvelles distances minimales d’épandage à proximité des zones d’habitation ont été définies par le Gouvernement le 27 décembre 2019. Elles ont aussitôt été contestées : insuffisantes selon les uns, excessives selon les autres.
« Le Conseil d’État observe aujourd’hui que l’utilisation des pesticides a notamment été encadrée en fonction des conditions météorologiques, ce qui est un critère pertinent », approuve l’institution. Mais il juge aussi que l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) dispose de données scientifiques solides sur les distances de sécurité d’épandage des pesticides. Et particulièrement de ceux « dont les effets cancérogènes, mutagènes ou toxiques sont avérés ou présumés ».
3 points à revoir
Or, l’ANSES recommande une distance minimale de 10 mètres entre les habitations et les zones d’épandage de tout produit classé cancérogène, mutagène ou toxique. Elle ne distingue pas si leurs effets sont avérés, présumés ou seulement suspectés. En conséquence, il juge que les distances minimales d’épandage des produits dont la toxicité n’est que suspectée, fixées à 5 mètres par le Gouvernement pour les cultures basses comme les légumes ou les céréales, sont insuffisantes.
De plus, des mesures de protection pour les personnes travaillant à proximité d’une zone d’utilisation et d’épandage de pesticides doivent être prévues. Ce qui n’est pas le cas de la règlementation en vigueur.
Autre point à revoir : les « chartes d’engagements » des utilisateurs de pesticides. La réglementation prévoit qu’elles doivent être approuvées localement par les préfets. Le Conseil d’État juge qu’elles doivent prévoir l’information des résidents et des personnes présentes à proximité des zones d’épandage de pesticides, en amont de leur utilisation. Le Gouvernement a donc 6 mois pour compléter la règlementation en vigueur concernant l’épandage des pesticides sur ces 3 points.
Enfin, le Conseil d’État annule par ailleurs les conditions d’élaboration de ces chartes et de leur approbation par le préfet. Celles-ci ne peuvent en effet être définies par décret, mais uniquement par la loi, conformément à une décision du Conseil constitutionnel de mars 2021.
Source : Conseil d’Etat