Lors du Salon des Maires de France ces derniers jours à Paris, la FNCCR (Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et Régies), qui relaie la voix des élus responsables de l’organisation des services publics locaux, a présenté un Livre Blanc sur la détérioration du service public de l’électricité et ses propositions d’amélioration. Elle souligne cette dégradation du rapport qualité/prix de l’électricité et ses conséquences néfastes pour les consommateurs domestiques et professionnels.
Elle part du constat que toutes les régions de France ne sont pas égales, malgré les dispositifs financiers qui devraient le même accès des consommateurs d’électricité à des services de qualité. Depuis une quinzaine d’années EDF (et aujourd’hui sa filiale ERDF), préoccupé par son développement à l’étranger, n’a pas suffisamment investi dans le réseau français. Les conséquences se traduisent par une « spectaculaire dégradation de la qualité de l’électricité distribuée » :
Cela se traduit notamment par une hausse du temps de coupure moyen par abonné et par an : 119 minutes en 2010. Ce qui signifie que certains usagers ont subi quelques minutes d’interruption de service (de l’ordre de 30 minutes en Ile-de-France) mais d’autres plusieurs heures (jusqu’à plus de 10 heures dans certains départements). S’y ajoutent des chutes de tension ou microcoupures, souvent fort préjudiciables aux entreprises et aux particuliers. Ces fortes disparités territoriales représentent une véritable fracture électrique.
Malgré de nouveaux investissements dans le réseau, la FNCCR estime qu’il faudra 8 à 10 ans avant d’observer un redressement. Les Français paient tous l’électricité au même tarif, mais ne bénéficient pas du même service : « le kilowattheure de qualité est moins cher à Paris qu’en Dordogne » . Ainsi, ERDF abuserait de sa situation de monopole, ce qui amènerait différents dysfonctionnements. A preuve, « les revendications récurrentes de la propriété des compteurs sont la partie visible de ces abus de monopole » : le débat a effectivement été relancé récemment lors des discussions sur la généralisation des compteurs Linky.
A propos des compteurs Linky, justement, la FNCCR estime que leur déploiement risque encore d’aggraver les choses, le Turpe (tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité) ne pouvant suffire à tout financer : « non financé à ce jour, le déploiement des compteurs Linky pourrait réduire significativement la part dévolue au redressement de la qualité dans le TURPE » .
Un projet de directive européenne prévoit de mettre en concurrence les concessions de distribution et de fourniture de l’électricité (et du gaz), ce qui sonnerait le glas du monopole légal d’ERDF, en laissant aux collectivités territoriales la possibilité de lancer des appels d’offres ouverts à différents opérateurs. La FNCCR rappelle qu’elle n’est pas favorable à cette mise en concurrence des distributeurs d’électricité, mais que les collectivités locales doivent quand même s’y préparer.
Face à cette situation, le Livre Blanc suggère quelques propositions susceptibles d’améliorer la situation : renforcer Les prérogatives des autorités concédantes et accroître le contrôle (la FNCCR explique qu’en cas de travaux non réalisés en temps et en heure par ERDF, les collectivités soient en droit de les accomplir elles-mêmes tout en les facturant à ERDF) ; pérenniser les services publics locaux de fourniture (« il devrait être rendu possible de créer des services publics locaux facultatifs de fourniture d’électricité qui coexisteraient avec des offres de marché ») ; choisir l’opérateur public :
Même s’il est possible d’éviter une ouverture générale à la concurrence des concessions et de préserver la gestion publique des réseaux, la FNCCR préconise qu’en dernier recours, après que toutes les procédures et négociations auprès de ERDF auront eu lieu, les collectivités concédantes aient le libre choix de leur opérateur public. (…) Des garde-fous sont cependant nécessaires : agrément national (valant garantie de performance) du ou des opérateurs publics locaux potentiels, emprise territoriale significative assurant une « péréquation régionale » et évitant un repli sur soi des zones structurellement profitables, tout en préservant les outils de péréquation nationaux.
ERDF a immédiatement répondu à ces attaques en affirmant que l’entreprise « maintiendra sa politique d’investissement nécessaire à la modernisation des réseaux » et en ajoutant :
En 2011, ERDF aura investi 2,8 milliards d’euros dans la modernisation de son réseau, soit près de deux fois plus qu’en 2005. Grâce à cet effort d’investissement, le temps de coupure moyen a été stabilisé en 2010 et devrait encore s’améliorer en 2011(…) Depuis le début de l’année, le temps de coupure moyen d’électricité par client est en amélioration de 27% passant ainsi de 62,2 minutes en 2010 à 45,1 minutes en 2011.
Sources : FNCCR, Batiactu, Energie 2007
Une réponse sur “FNCCR : Quel mode de gestion pour les services publics locaux de l’électricité ?”
Il y a effectivement une vraie recrudescence des coupures d’électricité en France depuis 5 ans (3x en 2 ans pour mon logement), et cela serait du (quelle suprise!) à la libéralisation du secteur de l’énergie en France. Cet article ( http://www.electricite.net/coupure.php ) explique très bien que la libéralisation a poussé Edf a négligé l’entretien sur le long terme des réseaux au profit du court terme et de la rentabilité et du coup, on assiste à une multiplication des coupures intempestives qui dérangent le citoyen, c’est scandaleux!