Y a-t’il d’un côté les gentils pays, ceux qui luttent contre le réchauffement climatique, et les vilains, ceux qui émettent plein de gaz à effet de serre, tout cela parce qu’ils ne font pas attention ? Pas si simple ! Si nous diminuons nos émissions de CO2, c’est aussi parce que nous, pays riches, délocalisons la production industrielle vers des pays qui produisent à bas coût. Nous déplaçons les émissions de gaz à effet de serre, nous ne les diminuons pas.
Depuis plusieurs années, pendant qu’en Europe, les émissions de CO2 se stabilisaient, voire diminuaient, elles augmentaient fortement dans les pays émergents. Au niveau mondial, la production de GES montait de 1 % par an dans les années 90, contre 3,6 % entre 2000 et 2007. Principal responsable : le charbon. Actuellement, il devance le pétrole : en 2008, il représentait dans le monde 40 % des émissions de CO2 contre 37 % dans les années 1990 – 2000. Le pétrole a suivi une courbe inverse : 36 % pour 2008 contre 41 % dans la décennie précédente. Et la Chine, dont 79 % de l’électricité provient du charbon, a doublé les Etats-Unis pour le triste record de plus gros pollueur du monde.
Mais la Chine produit de nombreux produits manufacturés qu’elle exporte. Deux chercheurs américains de la Carnegie Institution for Science ont récemment calculé (à partir des chiffres de 2004) l’importance des « externalisations de CO2 » à partir des flux monétaires internationaux dans différents secteurs industriels. Résultat : 22,5 % des émissions de CO2 de la Chine sont liées à l’export.
L’année dernière, à Washington, lors d’une réunion préparatoire au sommet sur le climat de Copenhague, le directeur du ministère chinois du changement climatique, Li Gao, déclarait :
Nous sommes au début de la chaîne de production pour l’économie mondiale. Nous fabriquons des produits qui sont consommés par d’autres pays, en particulier les pays développés. Cette part des émissions (de gaz à effet de serre) devrait être assumée par les consommateurs et non les producteurs.

Les pays européens, comme les Etats-Unis, externalisent une grosse partie des émissions de gaz effet de serre : au moins 30 % pour la France, le Royaume-Uni, la Suède et l’Autriche, jusqu’à 50 % pour la Suisse. Prenons par exemple les exportations alimentaires Chine/France : elles ont augmenté de 44 % entre 2005 et 2007. Pour les meubles, l’augmentation est de 54 %. Acheter une denrée produite à quelques 10 000 km d’ici nous revient souvent moins cher… Et le cas de la Chine n’est pas unique, il en va de même pour l’Inde et d’autres pays émergents.
Aux Etats-Unis, ce sont environ 2,5 tonnes de CO2 consommées par habitant et par an qui sont émises ailleurs, en Europe, jusqu’à 4 tonnes. Délocaliser la production vers des pays émergents, c’est aussi délocaliser les émissions de gaz à effet de serre.
Sources : Science et Avenir, Ushuaia, Inventerre, blog du Sénateur Trégouet