Pesticides, hydrocarbures, plastifiants, médicaments, éléments issus de l’industrie chimique… nos rivières regorgent de produits toxiques qui bouleversent le cycle des éléments naturellement présents dans l’eau de nos rivières. Mais qu’est qui pollue le plus les cours d’eau français ? Hélène Blanchoud, Maître de conférences en chimie de l’environnement à la Sorbonne, fait le point dans un article paru dans la revue The Conversation.
Les pesticides d’abord
Potentiellement, plus de 100 000 substances, issues des activités humaines, se retrouvent dans nos rivières. Les résidus prennent généralement la forme de micropolluants, ou substances toxiques à très faibles doses, dont les effets sur le long terme, en présence d’un cocktail d’autres molécules, sont peu ou pas connus sur l’homme.
Les pesticides représentent les premières substances détectées dans les cours d’eau. Logique dans un pays où la surface agricole utile couvre la moitié du territoire. Leurs concentrations varient selon les saisons et les cultures présentes sur le bassin versant.
Des herbicides sont souvent détectés. Parmi eux, le glyphosate et son produit de dégradation, car il est largement utilisé avant la mise en culture. L’atrazine aussi, produit pourtant interdit depuis 2003 : « S’ils se répandent plus rapidement en période de pluie, une grande partie des pesticides migre de façon diffuse vers les eaux souterraines, pour être restitués plusieurs années plus tard dans les eaux de surface. » Au fur et à mesure que certains produits sont retirés du marché, le choix se restreint pour les agriculteurs, mais le problème de fond de la pollution des cours d’eau n’en est pas réglé pour autant.
Les rejets urbains mal filtrés
Autres polluants bien présents : les rejets urbains mal filtrés. Source majeure de contamination, les rejets urbains des industriels et des particuliers rejoignent finalement les cours d’eau. Eaux de nettoyage chargées de détergents, plastifiants, solvants, eaux des douches, avec leurs produits d’hygiène, voire même excrétion via les chasses d’eau, avec des médicaments, des hormones, de la caféine. Les stations d’épuration, pourtant d’une efficacité croissante, laissent passer un grand nombre de composés.
A ces eaux usée s’ajoutent les rejets d’eau pluviale. Chargés de particules atmosphériques et de polluants présents dans l’air, ils ruissellent sur les routes, les toitures, entraînant des hydrocarbures et des métaux lourds (cadmium, plomb, zinc).
Une contamination des cours d’eaux difficile à mesurer
Ces composés d’origines agricole et urbaine, ainsi que les dépôts atmosphériques font l’objet d’une étude, dans le cadre d’un programme de recherche, intitulé PIREN Seine, en fonction des aléas climatiques et du régime hydrologique. Cela permet de comprendre les mécanismes de transfert des contaminants, de l’amont de la Seine et de la Marne, agricole, à l’aval de Paris, avec ses pollutions urbaines.
Mais, « une partie de ces composés se fixent sur les particules en suspension dans l’eau et sédimentent au fond de la Seine avant d’être remobilisés lors des mouvements provoqués par les crues ». cela rend délicat l’étude de la contamination par les micropolluants et de déterminer quelles substances vont rejoindre les cours d’eau.
Près de 900 paramètres sont suivis, mais ce suivi ne peut être exhaustif, car un grand nombre de substances ne sont pas détectées. En revanche, le recherches des biomarqueurs (indicateurs de pollution sur certains organismes) permettraient de mieux mesurer l’impact global de ces polluants sur les organismes. Si les normes européennes de qualité environnementale permettent d’estimer de façon cohérente la contamination, il n’est toujours pas possible d’identifier les nombreuses substances qui ne sont pas encore recherchées ou pas encore connues.
Source : The Conversation