L’Autorité de la Concurrence, à laquelle l’Etat a soumis le décret relatif à l’automatisation de la procédure d’attribution des tarifs sociaux du gaz et de l’électricité qui vient d’être promulgué (voir notre article du 11/03/2012), avait rendu un avis le 14 février qui faisait apparaître les points négatifs et proposait des solutions.
Le Tarif de Première Nécessité (TPN) de l’électricité et le Tarif Spécial de Solidarité (TSS) du gaz naturel comptent parmi les instruments mis en place pour lutter contre la précarité énergétique, qui touche environ 14,4 % des foyers français. Mais, remarque l’Autorité de la Concurrence, « quels que soient les modes d’attribution et de financement retenus, les dispositifs sociaux doivent néanmoins introduire le moins de distorsions de concurrence possibles. »
Pour le TSS, ce sont tous les fournisseurs de gaz naturel qui doivent faire profiter de la mesure leurs clients ayants droit. Ceux-ci se la verront donc appliquer automatiquement, sauf s’ils la refusent expressément : « ces modifications du processus d’attribution des tarifs sociaux ne soulèvent pas en elles-mêmes d’enjeux concurrentiels significatifs. »
Mais l’avis relève qu’il en va différemment pour le TPN, que seuls les fournisseurs historiques – EDF et les ELD (entreprises locales de distribution) – peuvent appliquer. En effet, lorsque l’avis de la commission avait été sollicité, en 2002, sur ce tarif spécial, elle n’avait rien relevé de particulier, puisqu’à l’époque le marché de l’électricité n’était pas ouvert à la concurrence : le fait que seuls les fournisseurs historiques le proposaient ne soulevait donc pas d’enjeux concurrentiels significatifs. Mais depuis 2007, tous les consommateurs français ont désormais la possibilité de choisir leurs fournisseurs d’énergie, et une directive européenne de 2009 précise :
Les états-membres veillent à ce que tous les clients aient le droit de se procurer leur électricité auprès du fournisseur de leur choix (…) À cet égard, les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour garantir que les procédures administratives ne constituent pas une discrimination envers les entreprises déjà enregistrées en tant que fournisseurs dans un autre État membre (…). Il convient de renforcer encore les obligations de service public, y compris en matière de service universel, et les normes minimales communes qui en résultent, afin que tous les consommateurs, en particulier les consommateurs vulnérables, puissent profiter de la concurrence et bénéficier de prix équitables.
Or, note l’avis de l’Autorité de la Concurrence, les fournisseurs alternatifs souhaitent aussi pouvoir alimenter les consommateurs vulnérables (environ 2 millions sur les 33 millions de consommateurs) au même titre que les autres consommateurs français et pourraient même leur proposer des prix plus bas que les opérateurs historiques sur la fraction non couverte par le TPN :
Le fait de réserver aux seuls fournisseurs historiques le soin de proposer le TPN est donc un frein significatif au développement des fournisseurs alternatifs sur le marché de la fourniture d’électricité, au détriment des consommateurs vulnérables. C’est d’autant plus le cas que, selon le représentant de l’association des fournisseurs alternatifs entendu en séance, la part des consommateurs vulnérables dans la clientèle des fournisseurs alternatifs serait trois fois plus importante que celle d’EDF.
L’Autorité de la concurrence conclut donc son avis par les recommandations suivantes :
Le fait que le Tarif de première nécessité (TPN) de l’électricité ne puisse pas être proposé par les fournisseurs alternatifs soulève, lui, de vraies difficultés au regard de la concurrence, dans un contexte où l’ouverture à la concurrence du marché français de l’électricité peine à se concrétiser.
Cet élément est susceptible de rendre plus difficile le développement des fournisseurs alternatifs non seulement sur le marché de la fourniture d’électricité mais également sur le marché de la fourniture de gaz, au détriment des consommateurs vulnérables. Il est possible que ces derniers soient moins en mesure de bénéficier de baisses de prix pour leur facture d’électricité que les autres consommateurs.
Afin de remédier à cette situation, l’Autorité recommande au Gouvernement de transmettre au législateur, dans les plus brefs délais, une modification de l’article L. 121-5 du code de l’énergie, de manière à ce que tous les fournisseurs d’électricité puissent être en mesure de proposer le TPN.
Source : Avis de l’Autorité de la Concurrence
Une réponse sur “L’Autorité de la Concurrence souhaite que tous les fournisseurs d’électricité puissent proposer le TPN”
C’est vraiment une bonne idée pour ces distributeurs