Le secteur européen de l’énergie n’est pas financièrement en pleine forme, c’est ce que révèle une étude du cabinet spécialisé Watt’s Next Conseil. Celui-ci dresse un Baromètre financier des énergéticiens européens, qui porte sur 25 entreprises du secteur et constate qu’elles vivent encore une année difficile, avec une croissance moyenne négative.
Les énergéticiens ne sont pas aidés par l’environnement de marché, qui reste très compliqué. Si la consommation européenne d’électricité et de gaz naturel a augmenté pour la deuxième année consécutive de 0,7 % pour l’une et de 7,4 % pour l’autre, les prix de gros quant à eux ont encore chuté : le prix spot moyen de l’électricité est tombé d’environ 10 % en moyenne, tandis que celui du gaz a perdu jusqu’à 25 %. Dans ce contexte, de nombreux groupes se débattent toujours dans un surendettement élevé. Une seule lueur pour eux : le déclin du ratio EBITDA/chiffre d’affaires a été stoppé (l’EBITDA est l’acronyme anglais du bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement), il a même gagné à 0,4 point.
Entre 2015 et 2016, le top 3 des énergéticiens européens a été bouleversé. Désormais EDF se place en première position – l’énergéticien allemand E.ON rétrogradant à la 6ème position, derrière son compatriote et rival RWE. Enel (Italie) prend la seconde place, suivi à la troisième place par un « petit nouveau » (créé en 2016), Uniper, qui fait une entrée en force sur la troisième marche du podium. Si l’on y ajoute le quatrième, Engie, ils représentent à eux quatre 47 % du total de l’échantillon en termes de chiffre d’affaires. Mais au total, si la chute de la croissance enregistrée cette année se situe à 8,1 %, les chiffres d’affaires consolidés de l’ensemble des acteurs ont reculé de 15 % en moyenne depuis 2012.
La baisse des prix de gros pèse sur l’activité du secteur, note l’étude, qui explique le repli quasi-général par quatre facteurs : des cessions réalisées ou prévues, un effet négatif avec le fort recul des prix de gros, un effet volume plutôt négatif malgré la hausse des consommations qui ne leur a pas profité en raison de la concurrence des opérateurs alternatifs, et la dépréciation de la livre face à l’euro (qui a affecté principalement EDF, E.ON, Iberdrola et RWE). Quant au ratio EBITDA/chiffre d’affaires, si sa dégradation est enrayée, cela n’a profité qu’à 10 groupes. « La voie du redressement est encore très longue, surtout pour les groupes allemands et britanniques. Plombés par leur parc de production d’électricité d’origine fossile, ils peinent à dégager des marges satisfaisantes puisqu’ils bénéficient relativement peu des rentes des ENR [énergies renouvelables] contrairement à quelques-uns de leurs concurrents comme Iberdrola » précise l’étude.
Au total, les énergéticiens européens ont généré une perte cumulée de 600 millions d’euros en 2016 : « les lourdes dépréciations d’actifs sont, comme en 2015, à l’origine de ce revers. » Pour les opérateurs allemands (E.ON et RWE), il s’agit même, selon l’étude, de « pertes abyssales. » Leurs investissements sont eux-aussi orientés à la baisse, et pour certains dans des proportions considérables. Mais le secteur est lourdement endetté (246 milliards d’euros en 2016) et le désendettement reste une priorité pour la plupart des opérateurs (78 milliards d’euros de baisse de la dette entre 2009 et 2016). Les deux tiers ont ainsi réussi à réduire leur dette l’an passé.
Dans un contexte européen délicat, les opérateurs du secteur continuent donc à souffrir sur le plan financier. La majorité a mis en œuvre des réponses stratégiques relativement proches : tenter de retrouver des marges de manœuvre financière en cédant des actifs, réduire le profil de risque (énergies renouvelables et smart grids retrouvent leur intérêt) et accélérer la transformation des business model. « Le principal risque pour les énergéticiens européens n’est pas de disparaître, mais de se retrouver cantonnés à des activités limitées et à faible valeur ajoutée, voire de perdre le contact avec le client. Mais parallèlement, ces mutations offrent de réelles opportunités et des relais de croissance potentiels aux opérateurs historiques. A l’image d’EDF avec Sowee, les opérateurs innovent, testent, se positionnent, etc. pour essayer de contrer l’arrivée de multiples nouveaux entrants (start up, équipementiers électriques, telco, etc.) » conclut l’étude.
Source : Watt’s Next Conseil