Dans une première vie, elle était nonne. Claire Anterea a consacré dix ans de son existence à Dieu avant de changer de cap et de reverser son trop-plein d’énergie dans la cause climatique. Claire est une femme pressée, en mouvement permanent, toujours entre deux rendez-vous. Avec les jeunes catholiques de son ONG, elle court à travers le pays pour monter des ateliers touchant des milliers de personnes. « La population perçoit le changement climatique, elle en subit les effets au quotidien. Mais dans les îles lointaines, les gens n’ont pas l’information, ils n’identifient pas les causes de leurs problèmes. » Alors Claire leur détaille les mécanismes globaux en cours. Les nations industrielles, dont les modes de vie sont basés sur les énergies carbonées, émettent des quantités intenables de gaz à effet de serre. L’atmosphère se réchauffe, la mer aussi, l’eau se dilate et les glaciers fondent. L’océan monte.
En 2007, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le fameux GIEC, prévoyait une hausse entre 20 et 60cm d’ici la fin du XXIe siècle. En attendant son prochain rapport officiel, la communauté scientifique internationale évoque désormais une fourchette de un à deux mètres. Peut-être plus. Les atolls des Gilbert culminent à peine à deux ou trois mètres d’altitude. Petit pays non industrialisé, les Kiribati ne produisent quasiment pas de gaz à effet de serre. Elles sont les premières à souffrir d’une situation dont elles ne sont pas responsables. « Le changement climatique est une injustice », répète Claire. « Nous coulons » , ajoute-t-elle avec un petit rire. Ce n’est pas un rire joyeux, plutôt une ponctuation dans la fatalité.
Julien Blanc-Gras
Paradis(avant liquidation)
Pages 32 et 33
Au diable Vauvert
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