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Le CNIID lance le site « La France de l’Incinération »

Le Centre National d’Information Indépendante sur les Déchets (CNIID) vient de mettre de ligne une nouvelle version  du site internet La France de l’Incinération. La France abrite 127 incinérateurs de déchets, soit le tiers du parc européen, sur son territoire. Mais jusqu’à présent, les seules informations que l’on pouvait trouver sur ces usines provenaient des exploitants ou des syndicats de traitement. Aucune source indépendante ne fait la synthèse de ces données. Ce site vise à combler ce manque de disponibilité et d’accessibilité des données en fournissant une information indépendante.

Une première version de ce site avait été mise en ligne il y a 10 ans. Mais à l’époque seules les questions sanitaires représentaient un enjeu majeur. Aujourd’hui, d’autres problématiques sont apparues : la contribution au réchauffement climatique des incinérateurs, la production de déchets dangereux et la privatisation du traitement des déchets ainsi que les coûts qu’elle entraine.

Un manque d’accessibilité aux données

Le site publie ainsi une carte de l’installation géographique des usines, avec pour chacune une fiche détaillées ainsi que les émissions en CO2 par installation. Se procurer ces données relève du « parcours du combattant » selon l’association : de nombreux rapports sur le prix et la qualité du service public de l’élimination des déchets ne sont pas disponibles en ligne… quand ils existent !  Une fois les rapports obtenus, le CNIID remarque des informations incomplètes pour beaucoup d’entre eux. Le fait que sur 117 courriers aux exploitants, le CNIID n’ait reçu (après relances) que 31 réponses, dont 28 strictement identiques (hormis entête et signature) ne donnant aucun des éléments demandés, montre combien l’accessibilité de ces données reste problématique.

La participation de l’incinération au réchauffement climatique

Sur le Registre des émissions polluantes, alimenté par les déclarations des exploitants chaque année, ne figurent que les émissions dépassent un certain seuil, et souffre, selon l’association « d’un manque de mises à jour ». Et le CNIID s’étonne qu’une industrie produisant chaque année plus de 12 millions de tonnes de CO2 ne vienne parler d’énergie renouvelable :

Depuis une dizaine d’année, l’industrie de l’incinération a entrepris de se refaire une « virginité verte » en mettant en avant à grand renfort de greenwashing les mérites d’une incinération productrice d’énergie « verte et renouvelable ».

Or, comment une industrie qui émet chaque année plus de 12 millions de tonnes de CO2 – soit l’équivalent du fonctionnement 2,5 millions de voitures – peut se targuer de produire une énergie renouvelable ? C’est uniquement parce que la moitié des déchets qui partent en fumée dans ses fours, sont d’origine organique. La préexistence, dans le cycle naturel, du carbone qu’ils contiennent (dit « carbone biogénique ») dispense, grâce à une interprétation curieuse des recommandations du Groupement d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC), de comptabiliser les émissions de CO2 issues de leur combustion dans les émissions totales. Dès lors, l’énergie issue de la combustion de ces déchets organiques apparaît neutre en carbone dans la comptabilisation globale des émissions de gaz à effet de serre de l’industrie incinératrice, et lui permet de prétendre « légalement » produire de l’énergie renouvelable.

L’association dénonce d’autre part le fait que non seulement la matière organique qui aurait pu être valorisée est détruite, mais que le carbone contenu dans cette matière a exactement le même pouvoir de réchauffement climatique que la combustion du plastique.

La production de déchets dangereux

Outre ces émissions de dioxyde de carbone, le CNIID relève l’importance de la production de résidus dangereux des installations. La combustion de 13,5 millions de tonnes de déchets a généré en 2008 près de 675 000 tonnes de résidus potentiellement dangereux : « Ce sont les REFIOM (résidus d’épuration des fumées d’incinération des ordures ménagères), qui sont classés comme « déchets dangereux » et doivent donc faire l’objet d’un stockage dans un centre spécialisé, ou décharge de classe 1. » « Une problématique souvent oubliée« , regrette l’association.

La mainmise des entreprises privées sur l’incinération, les coûts et leur manque de transparence

Le site montre aussi la mainmise des entreprises privées sur ce secteur : 91 % des collectivités délèguent l’exploitation de leur incinérateur au secteur privé. Or plus des trois quarts de ce marché sont détenus par trois géants français : Veolia (36 %), Novergie, filiale de Sita Suez (31 %) et TIRU (11 %), dont 51 % du capital est détenu par EDF, les 49 % restants étant partagés entre Veolia et Novergie. Ceci amène directement à un autre problème : les coûts de ces installations en constante augmentation :

Les questions de mainmise du secteur privé et de complexification de l’incinération, notamment en réponse à l’augmentation des exigences des normes environnementales, sont étroitement liées au constat de l’augmentation des coûts liés au choix de ce mode de traitement et d’un manque de transparence dans leur affichage. (…) On peut noter cependant l’initiative de l’ADEME, qui a développé la méthode ComptaCoût® « qui permet d’extraire de la comptabilité publique les informations nécessaires au renseignement de la matrice des coûts » qu’elle a développée pour permettre de regrouper les mêmes dépenses ou recettes sous les mêmes appellations d’une collectivité à une autre.

Le fait que de plus en plus de collectivités se forment à cette méthode, permet d’envisager « une amélioration progressive de la transparence des données financières délivrées par les collectivités, au bénéfice de leurs administrés. »

Source : CNIID

carte des incinerateurs

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