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Le gouvernement dit oui aux monstres sur nos routes. La circulation des 44 tonnes autorisée en France

Camion 44 tonnesSelon un décret publié le 18 janvier au Journal Officiel, la circulation des poids lourds de 44 tonnes est autorisée, avec entrée en vigueur immédiate pour les secteurs agricole et agro-alimentaire, légèrement décalée pour les autres :

Pour le passage de 40 à 44 tonnes de la limite du poids total autorisé en charge des poids lourds :

  • immédiate, pour le transport des produits agricoles et agroalimentaires ;
  • à la date de mise en application de l’écoredevance poids lourds, pour tous les autres produits.

Pour l’obligation d’un sixième essieu pour les transports au-delà de 40 tonnes :

  • à compter de 2014 pour les véhicules neufs ;
  • pour tous les véhicules à compter de 2019.

Un petit retour sur l’historique de cette décision s’impose. En juillet 2009, l’ex-secrétaire d’état aux transports, Dominique Bussereau, avait annulé son projet d’expérimentation de camions pouvant peser jusqu’à 60 tonnes, devant les protestations de la fédération France Nature Environnement (FNE), et avait demandé un rapport à l’Observatoire Energie Environnement Transports sur les enjeux de ces poids-lourds de 25,25 m de long et leurs effets sur l’environnement. Sans en attendre les conclusions, le président de la république avait signifié son accord à cette mesure le 30 avril dernier, cédant aux demandes réitérées de la FNSEA, et déclaré dans La France Agricole :

[Cette décision] aura un double effet : réduire les émissions des gaz à effet de serre et, (…) apporter un gain de productivité de 11 % sur le prix des matières premières agricoles.

FNE a annoncé le 18 décembre que l’observatoire avait rendu ses conclusions, qui n’ont d’ailleurs pas été rendues publiques. Mais selon la fédération, qui a participé au groupe de travail de l’OEET, les méga-camions pourraient engendrer des gains de CO2 de 0,7 %, tout en étant à l’origine d’émissions supplémentaires de 1 %. Michel Dubromel, responsable du réseau Transports et Mobilité Durables de la fédération, commentait ainsi les résultats de l’étude :

Nous sommes donc bien loin des gains environnementaux annoncés par les promoteurs de cette technique routière de l’ordre de 20%. Cette étude confirme que l’introduction de mégas camions en France n’a aucun intérêt sur le plan environnemental.

France Nature Environnement émettait par ailleurs l’avis que le report sur le rail et le fluvial était beaucoup plus efficace pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. La fédération, qui avait déjà dénoncé un coût considérable pour les infrastructures de ces camions, renouvelait donc son opposition à ce projet, estimant :

nécessaire d’examiner les impacts sur les infrastructures routières, la sécurité routière, le social, l’acceptabilité par les autres usagers de la route, la compétitivité des entreprises.

FNE n’a pas été entendue, puisque ce décret autorise la circulation immédiate de ces poids-lourds, avec une extension en 2012 pour tous les types de chargement. Elle juge ce texte inquiétant, d’autant plus qu’elle estime que le transport routier se trouve favorisé  par rapport au transport par voie de chemin de fer ou par voie fluvial, secteurs dont la part diminue au lieu d’augmenter (12 % en 2010 contre 14 % en 2006).

Le Comité national Routier estime quant à lui que 12 % des camions bénéficieront de ce décret, avec un accroissement de productivité de l’ordre de 10 %. Mais la dégradation des routes, entrainée par la circulation de ces méga-camions, devrait se chiffrer à 500 millions d’euros, somme imputée aux départements.

Sources : Le Journal de l’Environnement (articles du 18 janvier 2011 et du 30 avril 2010), Actu-environnement, Légifrance, auto-buzz.com (image)

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2 réponses sur “Le gouvernement dit oui aux monstres sur nos routes. La circulation des 44 tonnes autorisée en France”

  1. Encore un article a charge contre le camion qui, en plus déforme les chiffres. La route rapporte 36 milliards d’euros par an à l’Etat pour 16 milliards de dépense dans les infrastructures routières. Déjà 50% du trafic intéressé par le 44 tonnes existe déjà et justement pour les approches portuaires maritimes et fluviales et ferroviaires. Leur a-t’on demandé de payer quelque chose? Que sont 500 millions d’euros en regard des 20 milliards que rapporte la route? Qui sait que le système ferroviaire coûte déjà 13 milliards d’euros par an à nos finances publiques? Veut on en rajouter? Qui cherche à comprendre pourquoi le mode ferroviaire est en chute de volume constant? Les clients du fer disparaissent les uns après les autres. Pourquoi faire perdurer un système qui ne correspond pas aux besoins de notre société? A quel prix?
    Un peu de recul et de bon sens ne ferait pas de mal

  2. Plusieurs remarques :
    le fait d’autoriser ou non les poids-lourds de 25,25m et de plus de 44 tonnes ne changera en rien la perte de parts de marché du rail et du fluvial, car ceux-ci ne sont plus adaptés aux flux logistiques actuels. C’est le juste-à-temps de l’industrie et du commerce qui a détruit ces moyens de transport, mais comme d’habitude, on se focalise sur le thème « lécamionssapu » plutôt que d’aller se rendre compte pourquoi les industries et commerces font un usage ABUSIF de poids-lourds, et ça n’a rien à voir avec le 25,25m. Tiens, d’ailleurs pourquoi ne pas militer contre les véhicules articulés, et imposer sur la route uniquement des véhicules porteur de 26 de masse totale autorisée de 12 m de long ?
    Autre chose, en ce qui concerne les gains ridicules observés dans l’article : je n’y crois pas une seule seconde. J’ai déjà discuté avec un chauffeur de 25,25m suédois, qui me disait que son ensemble consommait 35 L/100 (soit à peine 20% de plus qu’un 40 tonnes standard). Certes, je n’ai pas les moyens de vérifier ses dires, mais dans le même ordre d’idées, les Canadiens ont depuis des années noté la plus faible consommation de leurs trains routiers (2 remorques standards) comparé à un ensemble ne tractant qu’une seule remorque. C’est pourquoi j’ai du mal à y croire, des notions de physiques de base allant à l’encontre de ces conclusions.
    Ma question : quels sont les paramètres de l’expérience qui ont abouti à cette conclusion surpenante ? Ça sent l’erreur méthodologique (ou la désinformation).

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