Les préoccupations de développement durable sont-elles compatibles avec un niveau de vie au-dessous du seuil de pauvreté ? Le cabinet de conseil et services en développement durable, Ethicity, en collaboration avec Youphil, vient de publier une étude où il analyse les modes de vie de cette population par rapport à la consommation durable, c’est à dire, selon leur définition, le fait d’acheter, utiliser et jeter mieux et moins.
La consommation durable n’est pas une « déconsommation » mais une nouvelle écologie domestique porteuse d’une meilleure qualité de vie pour tous et chacun, quel que soit son niveau de revenu, rappelait en mars 2011 le Conseil d’Analyse Stratégique. Mais les 8,6 millions de Français qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté l’entendent-ils ainsi ? La première remarque de l’étude signale que ce sont « des Français comme les autres » , avec les mêmes préoccupations : le bien-être des proches, la santé et le coût de la vie, même si ce dernier point représente pour eux une source d’inquiétude plus importante que pour la moyenne de la population (47,8% contre 46,3% pour l’ensemble de la population).
Des français comme les autres donc, parmi lesquels « les femmes font preuve de plus de systématisme dans le respect des éco-gestes » (recyclage, économies d’eau et d’énergie, attention portée au gâchis…), mais les jeunes (15-24 ans) par contre, s’ils se sentent aussi concernés par le développement durable, les systématisent moins que leurs aînés ou la moyenne des jeunes de leur âge. En ce qui concerne le tri des déchets, la différence vient de l’habitat, mais elle est plus sensible dans cette population : en zone rurale, 76,5 % déclarent le faire (contre 81,3 % pour la moyenne des Français), 71,6 % (contre 79,1 %) dans les villes de 100 000 habitants et plus, mais dans la région parisienne, ils dépassent à peine la moitié, 57,6 %, loin derrière la moyenne de la population, 77,9 %.
Accaparés par les contraintes économiques et moins sensibilisés, ils sont aussi moins nombreux à considérer le développement durable comme une nécessité : 28,9 % (contre 18,6 % en moyenne) disent ne pas avoir changé de comportement en faveur du développement durable dans les 12 derniers mois. Et dans l’ensemble, les éco-gestes « sont moins bien intégrés, alors qu’ils pourraient permettre des économies » :
- 8,1% jettent systématiquement les fruits et légumes qui n’ont plus l’air frais contre 5,5% pour la moyenne française
- 11,2% jettent systématiquement les produits qui ont dépassé la date de péremption contre 8,0% pour la moyenne française
- 44,9% évitent systématiquement ou régulièrement les produits qui ont trop d’emballage contre 49,4% pour la moyenne française
- 87,9% veillent systématiquement ou régulièrement à maîtriser leur consommation d’énergie contre 88,8% pour la moyenne française.
Ils se sentent pourtant prêts au changement et en ont envie, précise l’étude, mais ils expriment le besoin d’être accompagnés : ils estiment ainsi qu’une meilleure information (notamment sur le prix à l’usage) sur les avantages les pousserait à acheter des produits durables :
Mais surtout, les messages sur la consommation responsable doivent être plus concrets et simplifiés. Il faudrait par exemple valoriser les « systèmes D », pas uniquement en terme financier mais aussi en terme de savoir-faire. Et mettre en œuvre des incitations innovantes ou des approches collectives avec un effet d’entraînement ou de « mimétisme », tenant compte de la propension à consommer comme les membres de sa « tribu », notamment pour les jeunes.
Source : Ethicity