D’ici 2020, 35 millions de compteurs Linky doivent être installés sur le territoire français, et le déploiement doit commencer en 2013. D’ici là, beaucoup de questions cherchent encore des réponses et le Médiateur National de l’Energie ne cache pas que sous sa forme actuelle, ce déploiement ne lui convient pas.
Pierre angulaire des futurs réseaux intelligents (smartgrids), ces compteurs sont parés sur le papier de toutes les vertus : ils devraient diminuer les coûts des gestionnaires de réseaux, permettre de faire des économies d’énergie et donner un coup de fouet à la concurrence, au bénéfice des consommateurs. En 2011, Linky s’est retrouvé au cœur d’un vif débat : que peut faire réellement un compteur « évolué », avec quels services et à l’initiative de qui ?
Le médiateur de l’énergie suit de près ce dossier, et a plaidé, comme l’ADEME, pour un accès direct de tous les consommateurs à leurs consommations en temps réel (par afficheur déporté), et il regrette, par la voix du délégué général, que « cet outil ait davantage été pensé pour les fournisseurs et le distributeur que pour les consommateurs. » Le rapport rappelle les avantages que vont en tirer les opérateurs :
Les gestionnaires de réseaux vont en effet réaliser des gains de productivité, avec la fin de la « relève à pied » (35 millions de km par an pour ERDF), la possibilité d’effectuer des opérations à distance, le repérage facilité des pannes et de la fraude. Les fournisseurs, connaissant mieux les habitudes de leurs clients, pourront multiplier les tarifications innovantes et proposer de nouveaux services.
Pour les clients, rien que la facture établie sur des consommations réelles. Car, précise le rapport, pour que les compteurs communicants puissent jouer un rôle dans la maîtrise de la demande d’énergie, les données de consommations doivent être fournis directement aux particuliers à l’endroit où ils vivent, la consultation des compteurs n’étant pas souvent aisée (une moitié est à l’extérieur des logements, et une partie de l’autre moitié dans des endroits peu accessibles. Les études montrent que l’information apportée « en direct » permet de réduire de près de 10 % l’utilisation de l’énergie : « une solution d’information en temps réel et sur le lieu de vie doit être offerte gratuitement à chaque consommateur, avec un nombre limité d’options comme l’envoi de sms d’alerte ou l’installation d’un afficheur déporté délivrant des renseignements sur la consommation, le coût, le niveau de puissance appelée… » Il soutient donc largement la position de l’ADEME.
Pour être réellement « communicant », Linky devrait envoyer les informations, non seulement au gestionnaire de réseau, mais aussi au consommateur. Dans ce but, il devrait être équipé « en standard d’une communication sans fil ou en CPL (Courant porteur en ligne) vers le domicile. Une opération techniquement réalisable et peu coûteuse – moins de 3 euros –, si elle est prévue en amont. » Denis Merville précise :
L’afficheur déporté, petit écran à placer dans un lieu de passage du logement – qui serait à la consommation d’énergie ce que l’indicateur de vitesse est à la conduite automobile – fait l’objet d’estimations variables, entre 10 et 30 euros.
Le médiateur déplore donc que l’arrêté du 10 janvier ait écarté l’ajout de fonctionnalités supplémentaires, comme cet affichage déporté, dans les prestations de base. Les consommateurs pourront le faire installer à leurs frais, ce qui écarte les foyers les plus modestes, et donc ceux qui souffrent le plus de précarité énergétique.
Après avoir rappelé les différentes questions non encore résolues – la propriété des compteurs et le financement – il rappelle que ces nouveaux compteurs vont aussi engendrer de nouvelles contestations, ce qui a déjà été le cas, marginalement il est vrai en raison du faible nombre de compteurs installés, en 2011 :
Le médiateur entend rester vigilant, car le paysage des réclamations sera bouleversé. Les contestations liées aux erreurs de relevé et aux factures estimées devraient logiquement fortement diminuer, mais elles laisseront sans doute place à des litiges plus complexes, avec la difficulté de faire corriger des erreurs dues à d’éventuelles défaillances du système informatique. D’ores et déjà en 2011, treize consommateurs équipés de Linky ont saisi le médiateur.
Source : Le Médiateur National de l’Energie
Une réponse sur “Linky, un compteur « semi-communicant » selon le Médiateur National de l’Energie”