
Selon une étude Opinion Way, 75 % des Français sont favorables à l’interdiction du dépôt de catalogues, guides ou prospectus publicitaires dans les boîtes à lettres. Et pourtant, alors que la loi anti-gaspillage, votée il y a un an, renforce le dispositif du Stop Pub, une mesure de la loi Climat et Résilience, instaurant l’expérimentation du Oui Pub, fait débat. Les ONG la plébiscitent, les professionnels de l’imprimerie s’y opposent. L’ADEME a réalisé deux études en vue de réduire le gaspillage des imprimés publicitaires sans adresse. La première établit un état des lieux du dispositif Stop Pub, la seconde étudie la possibilité d’une expérimentation territoriale d’un dispositif Oui Pub.
Stop Pub : des mesures renforcées par la loi anti-gaspillage
En 2019, plus de 894 000 tonnes d’imprimés publicitaires non adressés ont été distribués, dont une part significative aura été jetée sans avoir été lue. Autrement dit, 13.6 kg par habitant d’imprimés non sollicités sont distribués en France chaque année, soit plus de 30 kg pour un foyer de trois personnes. Au total des tonnes de documents qui pour la plupart ne servent à rien. Dans les ordures ménagères, leur taux de captage moyen par les collectes séparées est estimé à 62 % (chiffre de MODECOM 2017), ce qui signifie que près de 40 % échappe au recyclage. De plus, 81% des Français pensent que le transport des catalogues, guides ou prospectus publicitaires déposés dans les boîtes aux lettres est néfaste pour l’environnement (étude Opinion Way pour Bonial).
La loi anti-gaspillage a l’an dernier quelque peu affermi le dispositif volontaire Stop Pub, en instaurant la mise en place d’un dispositif explicite de sanction, l’interdiction de distribuer des objets publicitaires (goodies) dans les boîtes aux lettres. A cela s’ajoutent l’interdiction de déposer des flyers sur les véhicules (depuis le 1er janvier) et une obligation d’utiliser du papier recyclé à compter de 2023.
Un dispositif relativement peu utilisé
Le Stop Pub se matérialise sous la forme d’un autocollant (souvent mis à disposition par les collectivités) ou d’un simple marquage sur la boîte aux lettres. L’étude de l’ADEME concernant Stop Pub révèle que le petit autocollant (utilisé par 20 à 30 % des foyers français, selon les diverses enquêtes) constitue un outil globalement efficace et qui convient aux attentes des particuliers.
Plus de 80 % se montrent globalement satisfaits de la réduction de la quantité d’imprimés publicitaires sans adresse (IPSA) qu’il entraîne. D’autant que le contenu de ces prospectus ne les intéresse pas toujours. Cependant, près de 3 Français équipés d’un Stop Pub sur 5 continuent à recevoir des imprimés publicitaires sans adresse, ce qui est illégal. Une mesure de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire en renforce à cet effet le montant de l’amende.
Oui Pub : une mesure du projet de loi Climat et Résilience
Le Oui Pub constituerait en revanche une marque pour accepter la publicité non-adressée, alors que la règle générale pour les boîtes à lettres non marquées serait le Stop Pub. Il s’agit donc d’un dispositif alternatif. L’ADEME a mené cette étude afin d’explorer les conditions, freins et leviers à l’expérimentation territoriale d’un tel dispositif à l’échelle d’une collectivité. Une mesure de la loi Climat et résilience le prévoit.
Dans les collectivités territoriales volontaires pour cette expérimentation, les imprimés publicitaires seront par défaut proscrits et ne pourront être adressés qu’aux foyers ayant apposés un autocollant ou un marquage Oui Pub. Ce dispositif vise à réduire de manière importante le gaspillage des imprimés et à améliorer l’efficacité de la distribution. 70 % des répondants (collectivités, annonceurs, acteurs de la distribution en boîte aux lettres, acteurs du recyclage, associations de consommateurs et associations environnementales) se montrent ouverts à cette solution.
Cette démarche permettrait notamment de mieux cibler les consommateurs qui souhaitent recevoir ces imprimés, et de réduire le gaspillage de papier occasionné par la situation actuelle. Selon l’ADEME, « la sensibilité de plus en plus forte aux enjeux de consommation responsable et de réduction du gaspillage ainsi que les préoccupations économiques de réduction des charges offrent par ailleurs un contexte favorable à ce type d’expérimentation ».
ONG environnementales et professionnels du papier s’affrontent
Les imprimeurs sont naturellement vent debout contre cette expérimentation qui devrait se dérouler sur 3 ans dans des collectivités volontaires. Selon l’association Culture Papier, « près de 60 000 emplois dépendent directement de l’usage de ce média ». Pour moitié, des emplois industriels (imprimeurs, recycleurs, logisticiens), et pour l’autre moitié des distributeurs d’imprimés publicitaires aux profils hétérogènes. Elle y voit aussi un effet rebond possible vers le numérique.
Ce n’est pas l’avis des ONG, comme Zero Waste, qui note : « Nombre d’ONG environnementales soutiennent l’idée d’aller beaucoup plus loin en basculant sur le principe d’une interdiction « par défaut » des publicités non sollicités, sauf dans le cas où l’habitant aurait explicitement indiqué son accord sur sa boîte aux lettres ». « Un tel changement aurait pour conséquence de diminuer drastiquement la quantité d’imprimés non sollicités distribués chaque année », souligne-t-elle.
Sources : ADEME, Bonial, Culture-Papier, Zero Waste