En matière de vaisselle plastique, les entreprises innovent : face à l’interdiction de vente entrée en vigueur au 1er janvier, elles continuent à vendre la même, mais avec la mention « réutilisable », ce qui change tout ! Zero Waste France qui a mené l’enquête dénonce ce stratagème et y voit un contournement de la règlementation. L’association demande aux citoyens de ne pas laisser passer et au gouvernement de renforcer la définition de vaisselle jetable.
Une réglementation de 2015, entrée en vigueur en 2020
L’enquête a été menée dans différentes enseignes de la grande distribution par Zero Waste France, qui voulait vérifier si elles respectaient l’interdiction de vente de vaisselle jetable en plastique, entrée en vigueur en début d’année. Force a été de constater que dans plusieurs d’entre elles – Franprix, Intermarché, Leader Price et Carrefour – la vaisselle plastique était toujours là. Non plus « jetable », mais « réutilisable » ! Et pourtant, c’est la même !
La réglementation ne date pourtant pas d’hier, elle n’a pas pris les fabricants par surprise. Elle fait partie de loi de Transition Energétique pour la Croissance Verte, adoptée en 2015. Celle-ci donnait un délai de 5 ans aux entreprises pour se préparer et s’adapter à son entrée en vigueur. Mais une Foire aux Questions du Ministère de l’Environnement, document qui n’a donc aucune valeur juridique, cherchait à préciser les bonnes pratiques. Elle énonçait « Un gobelet, un verre ou une assiette peut être considéré comme réutilisable dès lors que le produit passe au moins 20 cycles complets en lave-vaisselle dans les conditions techniques de réalisation des tests et de calibrage des appareils définies dans la norme NF EN 12875-1:2005 ».
Une vaisselle plastique « réutilisable » vraiment ?
S’engouffrant dans cette définition, les distributeurs, plutôt que de changer la composition de la vaisselle jetable, ont mis plutôt à profit le temps d’adaptation pour élaborer… une nouvelle mention ! Elle porte désormais la mention « réutilisable – le produit résiste à 20 cycles en lave-vaisselle ». Les entreprises se sont en effet saisies de cette information, en considérant qu’il était suffisant que leurs produits soient aptes à résister 20 cycles au lave-vaisselle pour éviter l’interdiction. Ce qui d’ailleurs n’est même pas le cas de cette vaisselle jetable.
Zero Waste France a donc testé cette vaisselle, avec des résultats peu concluants. « Nous avons pris au mot l’étiquette et tenté de manger 20 fois dans ces assiettes en les passant régulièrement au lave-vaisselle », explique Laura Châtel, responsable du plaidoyer de Zero Waste France. « Résultat : dès le premier lavage les assiettes ressortent légèrement déformées et cabossées. Après moins de 10 utilisations, la plupart étaient fendues ou avaient pris la couleur et les traces de gras des aliments qu’elles avaient contenus ».
Une mobilisation contre ces pratiques
Cette tentative de contournement de la loi est pratique courante, selon l’association. Dans le groupe Carrefour, cette vaisselle jetable était même vendue sous la marque du distributeur. « Une aberration alors que le groupe est par ailleurs signataire du Pacte national sur les emballages plastique et communique régulièrement sur son engagement de “100% d’emballages réutilisables, recyclables ou compostables” d’ici 2025 », rappelle l’association.
Cependant, suite au signalement de Zero Waste France, « le groupe Carrefour a annoncé sur twitter retirer de la vente les assiettes concernées », précise l’association. Elle n’en appelle pas moins « citoyens et gouvernement à se mobiliser pour ne pas laisser passer ce type de pratiques, qui font perdre de précieuses années dans la lutte contre la pollution plastique ». Elle demande également au gouvernement de renforcer la définition de « usage unique » et de sanctionner les contrevenants. « Pour Zero Waste France, il faut faire cesser ces pratiques d’urgence pour éviter que les nombreuses interdictions qui suivront en 2021 ne soient pas elles aussi massivement contournées. »
Source : Zero Waste France