La Ville de Paris a commandé une vaste étude prospective et stratégique au groupement de sociétés de conseil Elioth pour la réalisation d’une vision décarbonée de Paris en 2050. Les conclusions de l’imposant document (environ 400 pages), Paris change d’ère, sont claires : la perspective d’atteindre la neutralité carbone en 2050 est à la portée de la ville, mais cela passe par certaines mesures (parfois radicales) recommandées.
« La nature des chantiers abordés dans ce document dépasse ainsi de loin les domaines de compétences de la seule Mairie de Paris : les questions d’alimentation posent par exemple des défis d’aménagement du territoire et de reconversion d’exploitations agricoles bien au-delà du cadastre parisien, dans des juridictions ou modèles d’entreprises sur lesquelles la Mairie n’a pas autorité. C’est tout le défi de la mobilisation autour de l’objectif de neutralité. Si c’est à Paris intra-muros que se rattachent les différents postes d’émissions agrégés dans nos calculs, les solutions à mobiliser ont des ramifications bien plus larges » prévient le groupement en préambule de l’étude, qui se présente comme une contribution au débat d’une transition vers une ville bas carbone.
Le document décline le récit sous plusieurs formes thématiques : sociologique, chronologique et politique. Les sections 1 (le défi) et 2 (la vision de Paris en 2050) s’adressent d’abord aux spécialistes de l’action territoriale. La première partie de la section 3 (le grand récit de la neutralité carbone) est plus spécialement destinée aux experts, conseils et urbanistes. Les récits sociologiques (deuxième partie de la section 3) s’adressent par contre à tout lecteur qui doit se reconnaître dans l’un des 18 personnages proposés. La conclusion s’adresse aussi à tous et pose les jalons d’une mobilisation de grande ampleur pour mettre en œuvre les mesures clés de la transition.
« Cette stratégie de neutralité carbone a demandé un travail technique et scientifique pointu pour objectiver tant les trajectoires d’atténuation par enjeux, que pour la modélisation des évolutions de la compensation et de la séquestration des émissions résiduelles. » Les objectifs en sont les suivants : une réduction de 75 % des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports et du fret, dont 85 % pour la mobilité personnelle ; une réduction de 70 % des émissions liées à la consommation, qui passe par l’alimentation, les biens et les déchets ; une réduction de 75 % des émissions des bâtiments, dont 80 % pour les logements ; une solarisation massive intramuros, mais aussi en dehors du territoire parisien, en ce qui concerne l’énergie.
Pour y parvenir, le groupement propose la mise en œuvre de mesures emblématiques parmi lesquelles :
- 6 millions de m² de toitures solaires
- Rénovation jusqu’à 75 % du parc de logements actuels
- 150 hectares d’agriculture urbaine
- 75 % de demitariens (ou flexitariens) en 2050 (régimes alimentaires à teneur réduite en sources animales, privilégiant le « végétarien, le local, en saison ».)
- Division par 2 des déchets par habitant
- 2 fois moins de voitures, et 2 fois plus remplies, en mode partagé
- Un passage massif aux voitures électriques
- 52 weekends sans voiture par an en 2050
- Transformation du périphérique en boulevard urbain
- 5 fois plus de fret passant par la Seine.
« Notre conclusion est univoque : la perspective d’atteindre la neutralité carbone est à notre portée. Cette perspective justifie toute l’énergie, la vitalité de nos recommandations, mais aussi la radicalité de certaines d’entre elles. Nous soulignons, à travers le récit des familles, l’immense diversité des trajectoires individuelles qui, cumulées, façonneront les émissions des Parisiens. Ce document est une invitation à en tirer de nombreux « produits dérivés » : une saga télévisée, un simulateur numérique, des pièces de théâtre, des fonds d’investissement, des conférences politiques, des concertations de quartier. »
Source : Paris 2050 Elioth