Alors même que la consultation « le jour d’après » amenait en France à la proposition de création d’un revenu universel minimal, plusieurs gouvernements de l’Union Européenne joignent leurs voix pour en faire un projet pour l’Europe. Des ministres et responsables politiques espagnols, portugais et italiens signent un appel pour mettre en place un revenu minimum à un niveau européen, afin de lutter contre la pauvreté et l’exclusion.
Le revenu minimum, une idée acceptable ?
Ce sont particulièrement les pays les plus touchés par la pandémie de Covid-19 qui appellent à ce revenu minimum. En Europe actuellement, du fait de la crise sanitaire que nous traversons, 113 millions de personnes risquent la pauvreté et l’exclusion sociale. Et on estime à 25 millions le nombre d’enfants vivant dans des familles sous le seuil de pauvreté.
L’idée d’un revenu minimal universel n’est pas nouvelle. Un enquête sociale européenne de 2016 montre un soutien globalement élevé des citoyens au revenu de base. L’idée rassemble une bonne majorité dans la plupart des pays de l’UE. Les exceptions étaient à ce moment-là en France, en Estonie, en Autriche, en Allemagne et en Suède, où la suggestion rencontrait cependant l’approbation de 40 à 50 % de la population.
Un effet étonnant de la pandémie est la façon dont elle change déjà la façon dont la société perçoit les prestations de l’État. Dans de nombreux pays, des mesures ont été prises, ou renforcées si elles existaient déjà, pour prendre en charge les personnes privées d’emplois, même de manière temporaire, du fait de la crise sanitaire. Actuellement, la pandémie oblige pour la première fois de vastes pans de la population active à dépendre du soutien au revenu de l’État. Ceci rend actuellement d’autant plus acceptable pour les citoyens la mise en place d’un revenu minimum.
Une garantie prévue dans le Socle européen des droits sociaux
Mais les responsables politiques des trois pays européens particulièrement fragiles ayant signé l’appel à un revenu minimum, publié dans le journal Público, demandent à ce que cette mesure dépasse l’échelle des pays. Ils en appellent à une décision prise au moins à l’échelle européenne, voire même mondiale.
Ils rappellent que le Socle européen des droits sociaux (2017) garantit un revenu minimum : « Des prestations de revenu minimum adéquat doivent être garanties à ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes pour vivre dans la dignité à tous les stades de la vie ; un accès effectif aux biens et aux services doit leur être garanti. Pour ceux qui peuvent travailler, les prestations de revenu minimum devraient être combinées à des incitations à (ré) intégrer le marché du travail » (article 14 du Socle européen des droits sociaux).
Ces droits sont constitutifs du droit européen. Et ce revenu minimum doit non seulement garantir la survie des citoyens mais aussi assurer leur dignité humaine et des conditions de vies décentes selon les niveaux de vie de chaque pays. La crise totalement inédite que nous vivons amène une nouvelle donne, où l’économique et le social sont intimement liés, où les questions de vie et de mort des individus côtoient celles de certaines professions du bien-être social. C’est peut-être le moment, comme en appellent de nombreuses personnalités, à repenser le monde d’après, et à y intégrer une dimension plus importante de lutte contre la pauvreté et l’exclusion.
Sources : La relève et la peste, The conversation